Moi aussi, tout comme les héros de ce roman, j’ai eu 18 ans en l’an 2000. L’année où, le bac en poche, tout semblait possible.
Pourtant, pour Abel et Mila, tout s’est figé en 2000. Une vingtaine d’années plus tard, on retrouve Abel tout juste suspendu de son boulot de flic, tournant comme un lion en cage dans son petit appartement, entouré de dizaines d’orchidées qu’il couve de soins extrêmes. Mila, quant à elle, use de son pseudonyme pour signer avec toute la colère qui l’habite des performances qui font d’elle l’une des artistes les plus cotées du moment.
Abel est troublé par des événements qui se déroulent dans plusieurs musées parisiens, il se sent lié à tout cela mais n’arrive pas à en identifier la cause. Pendant une semaine sous haute tension durant laquelle ses insomnies et les réminiscences d’un passé difficile ne le quittent pas, sa coéquipière Camille va tenter coûte que coûte de l’ancrer dans une réalité qu’il préfèrerait fuir. Une autre femme entre alors en scène : Elsa. Elle habite dans une chambre de bonne deux étages au-dessus de l’appartement d’Abel. Elle va pénétrer dans sa vie comme par effraction, bousculant sa solitude sans qu’Abel puisse lui opposer la moindre résistance.
Claire Berest met tout en place de façon presque facétieuse. On pense entrer dans un roman lourd des horreurs du passé mais l’humour apporte la touche de légèreté nécessaire au lecteur pour découvrir les recoins du passé d’Abel et Mila. Une enquête au plus profond de souvenirs enfouis, l’Art comme révélateur et l’amitié comme garde-fou fragile.
Loin de ses deux précédents livres, l’autrice nous plonge complètement dans la fiction. Le premier mot qui m’est venu à l’esprit en en commençant la lecture fut « surprenant ! » et les deux derniers en le refermant « vraiment excellent ! ». Après deux grandes figures féminines sublimées dans Gabriële et dans Rien n’est noir, elle nous propose un incroyable personnage masculin dont le repli et la détresse nous attachent à lui jusqu’à un final extrêmement fort.
Aurélie.
Artifices, Claire Berest, Stock, 429 p. , 21€50.