Déjà ce livre, tu te dis que tu ne peux absolument pas passer à côté lorsque tu y lis en épigraphe un extrait de L’explorateur en folie, des Marx Brothers, jouxtant une citation obscure d’Homère. C’est donc sous le signe de l’Absurde que tu traces ta lecture.
Te voilà partie pour le « Palm Beach Finland » où, tout le monde le sait, le soleil brille en permanence.
Voici un polar écrit comme une comédie noire, un roman pas piqué des hannetons, léger, burlesque, reprenant, avec talent, les codes d’un film noir des années 50… ou 80 ou…est-ce à dire: le grand méchant bâti comme une armoire à glace, les deux arsouilles, une femme belle et mystérieuse, un gérant mythomane et un flic qui fait dans l’humain, même pas aviné, plutôt en proie avec sa planche à voile qu’avec ses démons intérieurs.
Sous le soleil éternel de Finlande d’Antti Tuomainen, traduit par le jongleur (car il faut l’être) Alexandre André, est ce polar génialement enlevé qui garde son rythme trépidant jusqu’à la dernière page.
Tant mieux pour toi, je ne vais pas en écrire des tonnes, quoique, je vais surtout te dire que j’ai passé un moment terriblement délicieux, parfois à en rire aux larmes, notamment cette scène où Chico, le Laurel de Tuomainen (Hardy n’est jamais loin), vit une communion « artistique » au coin du feu en compagnie de Bruce Springsteen. C’est assez dément.
Oui, parce que dans ce polar régressif, bon comme un fondant au chocolat, l’intrigue est certes le cœur de l’ouvrage mais les palpitations qui l’entourent en sont le sel.
L’histoire commence simplement. Jan Nyman, spécialiste dans les opérations secrètes, est envoyé au sein d’une station balnéaire « kitchissime » au possible, afin d’enquêter sur le meurtre étrangement sanguinolent d’un homme, petite vermine notoire, qui n’avait apparemment rien à faire dans les parages de ce bled nordique.
Comme dans un épisode de Columbo, tu vas vite savoir ce qui s’est passé et le talent d’Antti Tuomainen est là: faire défiler devant tes yeux ébahis, toute une galerie de personnages, finalement tous attachants à leur manière, et percer, non pas le mystère, mais la manière délirante dont ils vont se sortir de cette panade.
Selon sa définition, « la panade peut se rapprocher de la mouise. En effet, toutes deux désignent de soupes provençales de mauvaise qualité. La panade est faite à base de pain et est considérée comme le plat du pauvre: elle devient donc synonyme de misère. »
Ainsi nos Chico et Robin, notre Olivia Koski, notre Jorma Leivo et même notre Jan, sont dans de beaux draps et il s’agirait de s’en sortir au plus vite.
Bref, tu l’auras compris, Tuomainen t’emporte dans une comédie sous acide, joliment parfumée à l’air frais finnois. Ce serait franchement dommage de passer à côté, surtout lorsque la folie de notre monde nous guette ainsi.
Coup de ❤️ « on fire ».
Fanny.
Sous le soleil éternel de Finlande, Antti Tuomainen, traduction Alexandre André (Fleuve noir), 384 p., 19,90 euros.