Un jour de janvier 1943, Vadim descend du train, suit un homme qu’il ne connaît pas, marche avec lui dans la neige jusqu’au village de Vallorcine coupé du monde pour encore de longs mois d’hiver.
Aussitôt, le petit Parisien devient Vincent, officiellement ici pour soigner son asthme.
Il trouve en Blanche la douceur qui manquait à sa mère, en Louis (qui lui demande de l’appeler « Pépé ») l’homme qui valide son appartenance au village, en Olga celle qui le fera basculer de l’enfance à l’adolescence, en Moinette la compagne de jeu idéale et une source de savoir précieuse dans ce nouvel environnement où il a tout à apprendre.
Subjugué par la montagne qu’il découvre pour la première fois, par sa beauté changeante et tellement riche, il n’aura de cesse de devenir un vrai Vallorcin, ne reculant devant aucune tâche, aucun défi pour ne pas être perçu comme un Monchu, un Parigot inadapté à cette terre si exigeante.
Vincent a un don pour le dessin et il voit les mots en couleurs. La perception du monde qui l’entoure, totalement inconnu jusque-là, va passer au filtre de son esprit artistique et méticuleux pour faire de ces quelques mois hors-du-monde une parenthèse avant de retrouver la cruauté de son époque. À travers sa sensibilité si particulière, on touche peu à peu du doigt comment chaque détail de ce relief apaise les angoisses ancrées en lui depuis le début de la guerre.
Valentine Goby nous berce une nouvelle fois de sa plume si précise, elle réinvente pour nous une montagne toute en nuances, nous convie à la vie de ses habitants au rythme si différent selon les saisons, de la chaleur des bêtes partagée en hiver dans les habitations sous d’épaisses couches de neige aux journées interminables de la période des foins. Toutes les premières fois de Vincent nous émerveillent et on aimerait que ses découvertes ne s’arrêtent jamais.
J’ai eu besoin de lire ce roman lentement, sur plusieurs semaines, pour vivre pleinement l’éclosion de Vincent, retrouver tant de sensations de mon enfance et me laisser porter par son émerveillement quotidien.
Ne manquez pas ce splendide roman initiatique, à vous de vous installer à Vallorcine !
Aurélie.
L’Île haute, Valentine Goby, actes Sud, 288 p. , 21€50.