« Cette manie qu’il avait tout jeune.
Cette taloche sur le crâne qu’il avait pris l’habitude de me balancer avant chaque repas, comme ça sans raison, quand il passait derrière moi, que je me tenais tranquillement assis devant mon assiette et que sa mère ne regardait pas ; et même quand elle regardait d’ailleurs. Pas appuyée au début, presque gentillette, excusable encore, juste une petite tape, mais qui avait le foutu don de me taper sur les nerfs. »
Alors bien sûr, après sa parution, tu vas pouvoir en lire des trucs (private joke) sur le ouaibe.
Des trucs où la plupart des lecteurs vont t’expliquer les raisons qui font qu’ils n’ont pas été convaincus par ce roman. Trop ou pas assez quelque chose…
Des personnages caricaturaux auxquels tu n’arrives pas à t’attacher, une psychologie de comptoir, ou pas de psychologie du tout.
Ce genre de commentaires.
La plupart des lecteurs d’aujourd’hui, je me range dans cette catégorie et c’est pour ça que j’écris mes « trucs », sont difficiles.
Sans doute de plus en plus difficiles.
À tort ou à raison, je ne sais pas.
Toujours est-il qu’on s’attend, à chaque fois qu’on ouvre un roman, à être en face des pages qui vont bouleverser le classement qu’on se fait, souvent de manière inconsciente tout au fond de notre petit cerveau de lecteur, le classement, donc, des romans qui nous ont laissé une marque indélébile juste en face des yeux.
De ceux qui resteront à jamais écrits par la main d’un Écrivain, et Dieu sait qu’ils ne sont pas très nombreux.
Je comprends.
Je comprends aussi qu’on ne peut pas ouvrir ce roman idéal à chaque fois, ce serait presque désolant de ne plus pouvoir dire du mal des mots…
Voilà. Nous y sommes.
Un roman court, sur lequel je n’ai encore rien dit, mais qui a l’avantage, du fait justement qu’il est court, de pouvoir se lire vite. J’ai vu, il y a quelques jours, sur un site de connaisseurs de livres et de littérature, un avis qui disait qu’il aurait été souhaitable que l’auteur alterne les points de vue.
Genre roman choral.
Ben ouais, bien sûr.
Hervé Paolini se lance dans la littérature avec ce premier roman, et il aurait été souhaitable qu’il écrive Des souris et des hommes du premier coup.
Je comprends.
Tu vois, quand je te dis que la demande est parfois un peu au-dessus de ce qu’on nous offre à lire…
En même temps, n’est pas Thierry Jonquet qui veut et, de toute façon, la place est prise, dans mon cœur, définitivement.
Ce roman, c’est une histoire racontée par Félix.
Et Félix, c’est un type qui a eu le malheur de se remarier, après la mort de sa femme, avec l’infirmière qui s’occupait d’elle. Elle est jeune, plus jeune que lui, et elle a un fils.
Tu as deux solutions, en ouvrant ce livre.
La première, c’est d’y chercher le roman de l’année, et la seconde, c’est de te laisser entraîner dans l’histoire que te raconte Hervé Paolini.
Te laisser entraîner dans les pensées de Félix, le parfait représentant de « Chasse, pêche, nature et tradition », et forcément, tu risques d’avoir du mal à compatir à ses malheurs…
Je dis forcément, mais peut-être que non, finalement.
Ce dont je suis sûr, quant à moi, c’est que l’auteur ne s’est à aucun moment pris au sérieux, et que son ego est sans doute à l’inverse de celui de certains que je ne nommerai évidemment pas, pour éviter les hurlements d’orfraie que d’aucuns poussent (pas à l’Aire(s) Libre(s), jamais) sur le réseau de la société.
Un roman tout simple, écrit comme ces livres que je planquais sous mon pull, ceux qui avaient une couverture noire et jaune, dans le bibliobus de mon enfance, et que la dame du bibliobus, donc, me faisait un clin d’œil pour me dire qu’elle n’avait rien vu.
Soyons clairs, je les rapportais la semaine suivante…
Tu sais que dans mes mots à moi, ce n’est pas un mince compliment.
Attention, ne me fais pas dire ce que je n’ai pas dit.
Ce n’est pas le roman de la rentrée littéraire 2023, sans doute pas.
En revanche, c’est un roman noir, un roman social, comme il en sort peu, puisque chacun et chacune s’obstine à écrire le prochain « Meilleur Vendeur » de l’année.
C’est ballot, parce que c’est raté, presque systématiquement.
Quant à La Mort porte conseil, c’est plutôt un joli moyen de passer un moment, et tu vas faire une bonne action, en soutenant un éditeur très à l’écart de l’intelligence parisienne, et des sachants de la littérature…
C’est tout ce que j’ai à dire sur ce roman.
Nicolas.
La Mort porte conseil, Hervé Paolini, Serge Safran, 208 p. , 18€90.