Un roman incroyablement intime et émouvant. On suit une jeune homme de 20 ans, à la frontière de celui qu’il pourrait devenir.
La nuit imaginaire est une transition, un retrait, un exil. L’errance nocturne d’un jeune étudiant à qui sa tante vient de révéler les circonstances précises la mort de sa mère, survenue quand il n’avait que 6 ans, Gare de Lyon, un matin de septembre, à 7 heures. Le jour du changement d’heure.
Et justement, le temps est un fil de lecture d’une vie revisitée, aussi.
« La nuit est une berceuse sans fin, je lui prête mon corps avide d’être désiré. Heureux de ne plus porter mon nom.»
Il va commencer sa quête et son enquête, car il découvre dans un livre une photo de sa mère, qui date de 1976 , il va tenter de rencontrer des amis qui l’ont connue, pour l’amener, l’aider à comprendre son geste.
En compagnie de son amie Mona , il ira de fête en fête, dans Paris, puis seul, au coeur de Marais, au Hangar, entre autres. Là où les corps se rencontrent sans promesse, portés par le désir, muet, parfois, expressif, pourtant.
Une errance nocturne qui sera une transformation
Rencontrer, observer, écouter, expérimenter, comparer, réfléchir, se laisser aller. Une double quête s’installe : comprendre ses propres désirs, comprendre qui était sa mère, cette mère qui s’est suicidée.
Cette forme d’exil personnel libère ses pensées au présent, mais aussi au passé qui ressurgit, porté par ce qui se présente.
Par moments, sa mère erre en pensées avec lui, dans une certaine mesure parallèle à la vie.
« Elle vers la gare de Lyon, son terminus, et moi perdu dans la nuit infinie de ma jeunesse.»
« Un jour les branches seront nues et ce sera toujours vrai, un jour les bourgeons apparaîtront et ce sera toujours vrai, un jour reviendront les fleurs et l’été, et ce sera toujours vrai. Tout renaîtra mais pas elle.»
Une lecture qui émeut, saisit, comme une épiphanie
Ce roman sensible est comme une plongée intérieure et un exil porteur : les rues et les nuits dans Paris, les rencontres offriront peut être la révélation.
Par la splendeur de cette écriture, aussi, comme un abandon total, pour savoir, comprendre, retrouver, on a la sensation de lire plusieurs vies parallèles, une infinie sensibilité révélatrice, comme une nouvelle voie.
Comprendre, saisir, cueillir se fera , et va avancer, pas à pas, de plus en plus clairement, jusqu’à un jour réussir à quitter les nuits imaginaires et avoir la force de se jeter « pour la beauté du geste, la tête la première dans le grand bain ». Devenir soi, simplement soi, dans une vie non plus imaginaire, mais (re)construite.
« L’automne. J’y décelais une invitation inédite à remettre à l’heure les aiguilles de mon présent. Après l’hiver, plus rien ne serait jamais figé.»
Margot.
La Nuit imaginaire, Hugo Lindenberg, Flammarion, 240 p. , 21€.