Irène travaille depuis de nombreuses années pour l’International Tracing Service dans la ville de Bad Arolsen en Allemagne. Elle fait partie de cette équipe d’archivistes qui utilisent l’abondante documentation sur les persécutions nazies réunie dans le Centre pour retrouver la trace de personnes disparues en déportation, pour donner des réponses à qui en a besoin.
En cette fin d’année 2016, Irène va se voir confier une nouvelle mission qui va bouleverser aussi bien sa sphère professionnelle que privée. Sa directrice lui demande d’essayer de restituer à leurs propriétaires ou à leurs descendants des objets ayant été récupérés par l’ITS au moment de la libération des camps.
Commence alors le remarquable travail de romancière de Gaëlle Nohant : donner toute sa part à la vie et aux états-d’âmes de son héroïne tout en nous entraînant sur de nombreuses pistes, déroulant le fil de plusieurs histoires qui se mêlent les unes aux autres dans une construction hallucinante qui ne perd jamais son lecteur.
On passe de Varsovie à Thessalonique, de l’Italie à l’Argentine, de Paris à Berlin et, en même temps qu’Irène, on reconstitue le puzzle d’existences brisées. Wita, Lazar, Karl, Ewa, Elvire, Rudi et bien d’autres encore hantent ou habitent pleinement les pages de ce roman qui réaffirme l’importance de la mémoire même (et surtout) des dizaines d’années après la Shoah.
J’ai commencé ce livre comme j’en commence beaucoup d’autres. Enfin… pour être honnête, pas tout à fait, je l’ai commencé en me disant que je tenais certainement un trésor entre mes mains, le nouveau roman d’une autrice qui me surprend toujours et m’embarque à chaque fois entièrement dans ses écrits. Très vite, il a imposé son propre rythme : je ne pouvais le lire d’une traite, il fallait que je le découvre avec lenteur et que je laisse infuser chaque partie pour mieux apprécier la suite. Encore plus étrange, je ne pouvais lire un autre livre en même temps, moi qui mélange de nombreuses lectures sans problème habituellement. Je me suis rendu compte au bout de 2 jours que ce roman ne me laissait pas le choix : il fallait que je le lise lentement et que je ne lise que lui jusqu’à sa dernière page (oui, oui, un livre peut être tout à fait tyrannique !).
Je termine sur un court passage qui m’a particulièrement touchée :
« Ces vies qui en apparence n’ont rien d’extraordinaire, qu’on frôle sans les remarquer. Si on s’approche, on se rend compte qu’on a tout faux. C’est notre regard qui les simplifie. »
Aurélie.
Le Bureau d’éclaircissement des destins, Gaëlle Nohant, Grasset, 410 p. , 23€.
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