Léonor De Récondo nous entraîne dans un roman sensuel, passionné, passionnant, flamboyant.
« Ilaria se prend à rêver que ces deux heures pourraient être sa vie tout entière. La musique et la famille. L’ardeur qu’elle met soudain à jouer du violon parcourt son corps, fourmille dans ses mains. Son esprit, tendu par l’écoute, va exploser.
La voix, le virginal, la beauté. Elle tressaille, cette partition inconnue la remplit. Elle va prendre feu. Son violon va brûler, les tentures, le palais, tout va brûler. Elle n’est plus qu’une flamme vive, elle avec le ruban, l’habit blanc, ses tresses, une couronne incandescente(…) . »
Venise, XVIIe siècle.
Une femme, Francesca, décide du destin de son sixième enfant. Persuadée que celle-ci sera une fille, elle devra l’abandonné(e) pour que celle-ci puisse intégrer l’hospice-orphelinat de la Pietà, et faire ainsi partie de ce chœur céleste mené par un certain Antonio Vivaldi.
Les foules s’y pressent. La gloire est à fleur de voix.
Ce sera cet enfant, Ilaria, qui trouvera, dans la musique, sa porte vers la liberté: quitter les murs de la Pietà, vivre avec intensité, se défaire de l’abandon premier, renaître.
« (…)C’est dans le son qu’elle déclare son amour, qu’elle le déclame ; une exaltation du corps qu’elle ne trouve nulle part ailleurs que dans l’archet sur la corde. La vibration ondulante. Point de poèmes, point de mots assez beaux pour exprimer cette intensité-là. Parfois, en répétitions, quand son corps parfaitement aligné avec son âme, sans aucune tension, dans une joie profonde, parvient à jouer, quand l’onde circule lentement, elle se dit, j’y suis. Je deviens la respiration du monde. »
Ilaria éprouve alors le Monde par son archet, y trouve une amie précieuse qui lui permet d’échapper aux règles strictes de la Pietà, se laisse regarder par Paolo. Puis c’est l’incendie dans leurs cœurs, chacun à sa manière, l’adolescence crépitante.
Ilaria est une comète.
Léonor De Récondo nous entraîne dans l’histoire d’une jeune femme passionnée, où tout ne peut être qu’incandescent, fulgurant, ultime.
Le grand feu est une odyssée charnelle, musicale, intime, explosive, nichée dans les dédales de la Sérénissime, d’un romantisme tout à la fois fou et vivifiant.
Fanny.
Le grand feu, Léonor de Récondo, Grasset, 220 p. , 19€50.