J’aime ces histoires magnifiquement écrites, avec cette intensité flamboyante et cette beauté humaniste.
Eka Ashate – Ne flanche pas, écrit par Naomi Fontaine, est un roman du lien et des histoires en lien.
Au sein de sa communauté Innue, l’auteure tisse les vies de ces femmes et de ces hommes reliés par leur culture, leur destin, leur résistance.
Entre passé et présent, Naomi Fontaine déploie son talent pour nous offrir un perlage littéraire fait de souvenirs, de paroles d’aîné-e-s, d’hommages bouleversants, d’une transmission puissante qui aura survécu au génocide culturel.
Au cœur de l’exploration de sa communauté natale de Uashat, en Côte-Nord, existe l’amer remarquable de l’auteure, sa mère.
Mère courage, résistante, affirmée, engagée.
« Lorsqu’on sacrifie son corps plus d’un quart de siècle, il n’y a plus de fenêtre ouverte sur le doute. La religion n’est plus une croyance, elle devient l’absolu. La seule vérité qui existe. Un dogme. Et c’est contre cette terrible ferveur que ma jeune mère, pas encore adulte, a protesté. Il y a un portrait d’elle accroché dans le couloir de ma maison, entre la cuisine et le bureau. Elle est très jeune. Dix-huit ans à peine (…) Le portrait a été pris durant une fin de semaine d’évangélisation que son église locale avait organisée. Ma mère ne sourit pas. Elle fixe l’objectif. Un regard sans détours. D’une rare détermination. Le legs d’Alice. Un regard que je trouve somptueux. «
Eka Ashate – Ne flanche pas, c’est la phrase qu’un jour Jean-Guy dira à Naomi Fontaine, phrase qui la suivra jusqu’aux confins du Nutshimit.
Ce livre est le lien tissé entre les générations innues, c’est la parole franche et généreuse d’un aîné, c’est l’épaule qu’offre désormais l’auteure aux jeunes de sa communauté pour s’y appuyer, rendre la fierté d’être ce que l’on est.
L’intensité des expériences de vie se transmet alors afin que leur écho se propage encore et encore.
Fanny.
Eka Ashate – Ne flanche pas, Naomi Fontaine, Mémoire d’Encrier, 180 p. , 19€.