L’envie de partage et la curiosité sont à l’origine de ce blog. Garder les yeux ouverts sur l’actualité littéraire sans courir en permanence après les nouveautés. S’autoriser les chemins de traverse et les pas de côté, parler surtout de livres, donc, mais ne pas s’interdire d’autres horizons. Bref, se jeter à l’eau ou se remettre en selle et voir ce qui advient. Aire(s) Libre(s), ça commence ici.
Gasping river / Le verger de marbre, Alex Taylor (Gallmeister) — Nicolas
Gasping river / Le verger de marbre, Alex Taylor (Gallmeister) — Nicolas

Gasping river / Le verger de marbre, Alex Taylor (Gallmeister) — Nicolas

Tu ne t’en souviens peut-être pas, mais j’avais lu, il y a une paire d’années, le premier roman d’Alex Taylor. Je te mets sous celui-ci, mon avis presque dithyrambique sur Le verger de marbre.

Gasping river…

Je l’ai terminé, mais quasiment contraint. Ce qui revient à dire que je le relirai dans quelque temps. Sans doute que mon humeur du moment n’a pas joué en faveur de cette lecture et que les 150 dernières pages resteront pour moi un genre de lettres mortes dans lesquelles j’espérais finalement trouver la substantifique moelle.

On va se le faire gentil, puisque je ne peux pas me décider à dire du mal d’Alex Taylor, eu égard au verger dont je te parlais précédemment.

Je me suis fait suer, souvent.

C’est le moins que je puisse dire, et ça me désole d’être sans doute passé à côté.

Je me suis fait suer, et n’ai rien retrouvé de cette émotion que j’espérais après Le verger de marbre.

Rien.

Ce n’est pas grand-chose, même si trois fois rien, c’est déjà quelque chose.

Mêler deux histoires (j’ai failli dire intrigues), ça peut marcher. D’ailleurs, et toi et moi, on connaît des romans dans lesquels ça a marché.

Pas là. Pas pour moi.

C’est lent, pour ne pas dire poussif, et les digressions poétiques sont à la limite de l’absurde.

Alors bien sûr, Alex Taylor est un conteur d’exception.

Est-ce que ça suffit ?

Est-ce que lier l’histoire du Handsome Molly et celle de Glen, ancien boxeur, devenu peintre et disparaisseur de cadavres, ça suffit ?

Est-ce qu’une vague histoire d’amour et de vengeance, ça suffit pour faire un bon roman noir ?

D’aucun déclareront, toujours les mêmes, que je n’ai pas compris à quel point, même si le traducteur a changé (on passe d’Anatole Pons-Remaux à Fabienne Gondrand), Alex Taylor est à même de nous parler de son Kentucky sans aucune fausse note.

Qu’il parle de cette société américaine (qui commence à nous laisser un peu sur notre faim) avec des tremolos dans la voix, et que ce n’est pas donné à tout le monde.

Bien sûr qu’il y a des phrases qui m’ont touchées.

J’ai appris que l’argent ne faisait pas de musique, même s’il fait du bruit. C’est le bruit que fait un imbécile à chaque fois qu’il est persuadé d’avoir emprisonné suffisamment de liberté pour oublier tous ses doutes sur lui-même.

Et c’est tout, comme dit Christian Oliver dans un texte des Têtes Raides.

Donald Ray Pollock, là aussi, il y a une paire d’années, recommandait la lecture du Verger de marbre.

Pas cette fois.

Sans doute que l’histoire dans l’histoire, la légende que Taylor nous donne à écouter, n’est pas aussi bien transcrite (tant s’en faut) que le reste du roman.

Certainement aussi que la manière de les lier m’a laissé sur ma faim.

Pas la peine d’en faire des caisses.

Je suis déçu.

Réellement déçu.

J’ai espéré

Je vais donc finir le second roman d’Alex Taylor, et je reviens t’en causer dans quelques jours.

En attendant, jette donc un œil circonspect sur la chronique juste en dessous.

C’est tout ce que j’ai à dire sur ce roman.

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Fabienne Gondrand.

Nicolas

Gasping River, Alex Taylor, Éditions Gallmeister, 400 p. , 24€.

Et on est donc toujours chez Gallmeister…

Et on revient aussi aux traducteurs. Cette fois, c’est Anatole Pons.

Alors merci à lui, pour cette traduction qui n’a pas dû être facile. Se glisser dans la peau d’Alex Taylor…

Une lecture qui remonte déjà à cinq années et que je viens de relire, cause la déception du dessus…

Je viens de refermer un des meilleurs bouquins que j’ai ouverts depuis un grand moment.

Souvent, tu lis un livre et tu aimes l’histoire.

Parce que c’est bien raconté.

Le style ne te laissera pas de souvenir pendant les trente prochaines années, mais bon, aujourd’hui, c’est difficile d’avoir le beurre, son argent et l’amour de la crémière en même temps.

Alex Taylor, il n’a pas que la capacité à raconter une histoire, il a un vrai style. Tu l’imagines presque comme le descendant de ces auteurs qui sont au firmament de la littérature américaine.

Tu vois lesquels ?

Ceux qui donnaient la vie à leurs personnages au point que tu étais sûr qu’ils existaient quand tu refermais le bouquin.

Alex Taylor, il fait pareil.

Tu vois tout ce qu’il te raconte. Tu entends tous les mots prononcés par ses personnages, tu sens toute la merdasserie qu’il remue dans ce roman.

Je te fais le pitch, vite fait.

Non, je déconne, Ghislaine, je fais pas de pitch. C’est juste marqué derrière le bouquin. Ce n’est pas comme si je dévoilais le roman et que tu n’avais plus qu’à aller en chercher un autre.

Beam tue un type, un soir, parce que le type en question veut lui piquer son blé. Comme ce type, c’est le fils du boss du coin, Beam se barre, sur les conseils de son père.

Il se tire dans la forêt, et rencontre un type super sympa. Un papy dont tu sens qu’il n’a rien à prouver à personne. Juste, il aide Beam, et c’est bien. D’ailleurs, ce papy, il a une fille aussi.

Le boss que Beam s’est mis à dos, c’est Loat Duncan. Il a des chiens genre doberman, un peu féroces et super pas sympas.

En plus, y a un secret que je ne peux pas te dire, bien sûr.

Parce que si je te le dis, je vais me faire engueuler. Alors, je ne te dis pas.

Voilà.

C’est un premier roman et là, tu hallucines.

« Le vautour le toisait depuis son perchoir sur un des ormes malades, les ailes déployées en une croix noire… /… dans la posture de celui qui impose le silence au monde… », ça te claque dans la figure, juste au milieu du museau.

Tu es dans le Midwest.

Ce sont des paysans là-bas. Un peu comme chez nous en Lozère avant les touristes. La vie n’est pas facile, mais ils s’y sont habitués.

« Bon, ben alors tu ne sais pas vraiment c’que t’es, hein ? Tu pourrais avoir un huitième de sang négro ou trois quarts de fils de pute que t’en aurais pas la moindre idée. »

Tu sais, cette Amérique qui croit encore à Dieu et à son contraire, celui qu’on ne nomme pas…

Le verger de marbre, tu as compris, c’est le cimetière dans lequel Beam trouve un semblant de refuge. Et dans tous les vergers, y a un jardinier…

Les mots d’Alex Taylor, c’est des images qu’il t’envoie dans la tête.

Des images parce que tu fuis avec lui dans la forêt, tu sens les odeurs de pourriture, tu renifles les sentiments de ceux qu’il croise, tout comme si tu étais là-bas, avec lui.

C’est magique.

Dans le bon sens du terme, pas celui des tours de cartes ou de Henri le Potier.

Alex Taylor a été comparé à Cormac McCarthy, ou à Donald Ray Pollock.

Ce genre de littérature, c’est de la bombe.

Vraiment.

La claque que je n’avais pas reçue depuis un bon moment.

Depuis Bouysse (à la belle époque), Varenne, et autres Dewdney, pour être précis, et pour ne te parler que des frenchies.

Même si on n’est pas dans le même registre.

Une société, à l’écart de tout, dont toi non plus tu n’as jamais entendu vraiment parler. Comme moi, t’a juste imaginé comment ils vivent au fond du lointain Ouest sauvage.

Tu vas descendre dans les ténèbres.

Rencontrer le Diable, celui qui se cache parmi nous.

Tu verras des personnages que tu n’aurais pas pu imaginer, c’est pour ça qu’Alex Taylor te les présente, comme Daryl, l’homme aux moignons, qui fait trôner un bouc dans son bar.

Le bouc, tu vois l’allusion ?

Et puis y a le routier, en costard.

Lui, tu lui donneras le Bon Dieu sans confession.

Normal.

Pas besoin d’en dire plus.

Un dernier point, important, et pour que t’oublie pas.

Spéciale dédicace à Anatole Pons. C’est un grand traducteur.

Va le chercher.

Vraiment.

Vas-y.

Pour le coup, tu ne vas pas regretter tes sous.

C’est tout ce que j’ai à dire sur ce roman.

Nicolas

Le verger de marbre, Alex Taylor, Éditions Gallmeister, 272 p. , 10€20.

Parce que c’est le plus bel aria de mon monde…

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